Pourquoi faire un film en noir et blanc actuellement ?

Bonjour à tous ! Aujourd’hui, intéressons-nous non pas à une symbolique sur un objet ou un concept mais à un choix cinématographique : le noir et blanc

Naturellement, nous voyons les couleurs, sauf trouble de la vue. Ainsi, un film auquel il manque les couleurs va poser des questions :

pourquoi ne pas avoir montré ce que je vois habituellement ? Pourquoi faire ce choix de mise en scène ?

Bordons cet épisode avec des films qui ne font pas partis de la période noir et blanc, sinon la question serait vite résolue : la technique ne permettait pas de mettre de la couleur. Même si, depuis les débuts du cinéma, on peut trouver des films dits “colorisés”, puisqu’on peignait sur la pellicule. Je vais me tourner vers des films tournés après 1955, quand la couleur était pleinement fonctionnelle et utilisée.

Car, voilà une question : pourquoi si l’on possède la technologie pour filmer en couleur, certains reviennent au noir et blanc ?

L’esthétique

On ne va pas se mentir, le noir et blanc, tout comme en photographie, dégage une atmosphère à lui seul. Le noir et blanc est parfois considéré comme un médium lié à la poésie, aux émotions pures ou encore à la beauté des traits. Il se dégage du noir et blanc comme une certaine mélancolie. L’absence de couleur force le réalisateur ou le photographe a travaillé les contrastes, la pureté des formes et les textures de l’image.

Le cerveau doit retrouver les couleurs, comprendre dans cette nuance de gris ce qu’il voit et regarde. Ainsi filmer ou photographier en noir et blanc est un peu plus compliqué. L’artiste doit veiller à rester compréhensible et son sujet visible sans trop de difficulté.

Le noir et blanc est connoté comme parti-pris artistique et intégré dans le film comme choix fort. Encore plus qu’en pellicule couleur, il faut créer des plans travaillés, presque des tableaux. Mais filmer en noir et blanc à l’époque de la couleur peut se révéler audacieux. Cela peut effrayer le public qui peut penser se trouver dans un film d’auteur contemplatif. Et je n’ai rien contre les films d’auteurs contemplatifs. Le tour de force le plus récent est bien entendu celui de The Artist en noir et blanc ET muet, il fallait oser à l’heure des reboot de reboot.

The Artist de Michel Hazanavicius

Cela peut aussi être utilisé pour démarquer certains passages d’un film et je ne compte pas les flash-back. Parfait exemple avec Memento où les scènes chronologiques sont en noir et blanc alors que le reste du film est en couleur. Tetro, le film de Francis Ford Coppola fait l’inverse de ce qui est commun de voir avec des souvenirs en couleur et l’histoire en noir et blanc !

Raconter de vieilles histoires, rendre hommage

Mais comme nous l’avons vu, le noir et blanc a existé, par soucis techniques, au cinéma. Il connote une période, un âge, un style de film. On peut citer les séries noires, les films de série B avec des monstres ou des créatures étranges ou les films de l’âge d’or hollywoodien datant des années 30.

Utiliser le noir et blanc peut-être naturellement choisi pour raconter des histoires datant de ces périodes. Ou encore des histoires se situant bien avant

Mais aussi pour rendre hommage à cette période. C’est le cas pour Ed Wood qui raconte l’histoire du plus « mauvais » réalisateur de tous les temps. Pour la petite anecdote, le film est tourné en noir et blanc pour que l’acteur qui joue Bela Lugosi ressemble au véritable Bela.

On peut aussi citer des films qui collent à des œuvres déjà en noir et blanc comme les planches de Sin City ou la BD de Persepolis. Ces deux œuvres sont à la base en monochrome et la volonté de coller au plus près à la vision d’origine poussent les films à l’être aussi.

Sin City de Robert Rodriguez, Frank Miller & Quentin Tarantino

Pour des questions de technique

Il arrive parfois que des choix esthétiques soient dues à des questions techniques. C’est le cas pour Good Nigh and Good luck où de vraies images d’archives ont été placées, images d’archives de la télévision en noir et blanc. On peut aussi citer les astuces de maquillage qui rendent mieux sans couleur avec Elephant Man. Mais c’est surtout pour parler d’une époque plutôt que de servir de cache-misère. Pour Elephant man, les artistes de maquillage connaissent suffisement leur travail pour pouvoir les produire même en couleur !

Il arrive aussi que pour des raisons d’esthétisme sur un seul élément, tout soit filmé en noir et blanc. C’est le cas pour Raging Bull où les gants rouges de Robert DeNiro étaient beaucoup trop voyant pour le réalisateur.

Elephant man de David Lynch

Mais n’oublions pas que ce choix reste celui du réalisateur, même s’il doit souvent batailler avec les producteurs pour se faire entendre. Ainsi, La Haine a été tourné en couleur pour favoriser un passage télé mais des copies noir et blanc furent tirées tout de même. Ces copies l’emportèrent dans le cœur du public et la version finale est en noir et blanc. La fille sur le pont a été imaginé, dès le départ, par Patrice Leconte en noir et blanc et il ne peut pas l’imaginer autrement, encore maintenant.

Cet article est à présent terminé. J’espère que vous l’avez apprécié. N’hésitez pas à me dire en commentaire les films en noir et blanc qui vous ont le plus ému. À partager la vidéo ou l’article sur les réseaux sociaux et d’ici là, je vous dis à bientôt, portez-vous bien et ouvrez l’oeil !

Quelques films modernes, en noir et blanc

  • Annabelle Serpentine Dance William K.L. Dickson, William Heise (1895) 
  • Dead Man Jim Jarmusch (1995)
  • Tetro Francis Ford Coppola (2009)
  • La Liste de Schindler Steven Spielberg (1994)
  • Sin City Robert Rodriguez, Frank Miller (2005)
  • La Haine Mathieu Kassovitz (1995)
  • The Artist Michel Hazanavicius (2011)
  • Memento Christopher Nolan (2000)
  • Ed Wood Tim Burton (1994)
  • Persepolis Marjane Satrapi, Vincent Paronnaud (2007)
  • Good Night, and Good Luck George Clooney (2005)
  • Elephant man David Lynch (1980)
  • Raging Bull Martin Scorsese (1980)
  • L’étreinte du serpent Ciro Guerra (2015)
  • Frankenweenie Tim Burton (2012)
  • The good German Steven Soderbergh (2007)
  • Coffee and cigarettes Jim Jarmusch (2004)
  • La fille sur le pont Patrice Leconte (1999)
  • The barber Joel Coen(2001)
  • Manatthan Woody Allen (1979)

Ils ont osé le noir et blanc sur Allociné

Raphaëlle Roux

Je suis une sorte de couteau suisse du web : graphiste, illustratrice, vidéaste et photographe.

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